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Petit malaise dans la philosophie.
Un billet d’humeur de Thierry Renard

Lettre à Frédéric Pagès, Le Canard enchaîné.

Vénissieux, le 14 février 2010.

Cher Frédéric Pagès,

il y eut, encore tout récemment, l’histoire du canular qui a piégé Bernard-Henri Lévy, histoire drôle et révélée par vos soins...
Mais ce n’est pas tout. À l’occasion du cinquantième anniversaire de la mort d’Albert Camus (4 janvier 1960), largement célébrée dans le pays, j’ai cru bon attirer votre attention sur une autre histoire, certes plus petite, mais qui mérite tout de même qu’on s’y attarde un peu.

C’est une autre histoire de philosophe, et non de philosophie, mais cette fois liée à Charles Pépin. Qui est Charles Pépin ?
L’encyclopédie libre Wikipédia nous le présente ainsi : « Charles Pépin est un philosophe, écrivain et journaliste français de 36 ans.
Charles Pépin est diplômé de Sciences Po Paris et d’HEC Paris. Également agrégé de philosophie, il enseigne cette dernière au lycée d’État de la Légion d’Honneur (Saint-Denis) et à l’institut d’Études politiques de Paris... Enfin, il participe régulièrement à Philosophie Magazine, dans lequel il répond chaque mois à une interrogation personnelle d’ordre philosophique, métaphysique ou morale formulée par un lecteur. »

Le bonhomme a l’air sérieux. Dans son livre, Une semaine de philosophie, 7 questions pour entrer en philosophie (Flammarion, 2006), qui s’adresse particulièrement aux lycéens et à leurs parents, ainsi qu’à tous ceux qui s’interrogent sur le sens de leur vie, il nous entraîne dans une sorte d’élévation où « Penser, c’est exister au plus niveau d’existence possible. »
L’ouvrage est composé de sept chapitres plutôt évocateurs, couvrant la semaine, du lundi au dimanche, et allant de « Réfléchir peut-il nous rendre heureux ? » jusqu’à « Comment se préparer à mourir ? ». Et il y a un chapitre qui m’a particulièrement intéressé, celui du vendredi, « Faut-il croire en Dieu ? ». Dans ce chapitre, en introduction, Pépin revient sur le célèbre roman de Camus, L’Étranger. « L’étranger, dans le roman d’Albert Camus, est un homme que rien ne semble affecter radicalement,
ni la mort de sa mère, ni celle de l’Arabe qu’il tue à coups de couteau... »

Tout le problème vient de là. Du meurtre de l’Arabe.
En effet, dans le roman de Camus, point de couteau dans la main de Meursault, son personnage, mais un revolver.
« Tout mon être s’est tendu et j’ai crispé ma main sur le revolver. La gâchette a cédé, j’ai touché le ventre poli de la crosse et c’est là, dans le bruit à la fois sec et assourdissant que tout a commencé. J’ai secoué la sueur et le soleil. J’ai compris que j’avais détruit l’équilibre du jour, le silence exceptionnel d’une plage où j’avais été heureux. Alors, j’ai tiré encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s’enfonçaient sans qu’il y parût. Et c’était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur. » (Première partie, chapitre 6).
Bien entendu, c’est un détail, mais cela fait tout de même une petite différence.

Comment croire en Dieu, après ça ? Comment croire en Charles Pépin ? Et, surtout, quel avenir pour la philosophie ?

Bien cordialement,
Thierry Renard 


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